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Les découvertes du chamois
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11 novembre 2007

Juillet 36 - 11 novembre 36 - Le serment de Douaumont

A l’occasion du Rassemblement international des Anciens Combattants qui eut lieu à Verdun, en juillet 1936, des milliers de soldats alliés et ex-ennemis prononcèrent ensemble un serment de paix : le serment de Verdun, sur les lieux mêmes où s’étaient affrontés leurs courages.
Pour le 11 novembre de cette même année un carte postale magnifiait cet engagement.


 serment_de_douaumont_361111

 

 

11 novembre 1936. –
Parce que ceux qui reposent ici et ailleurs ne sont entrés dans la paix des morts que pour fonder la paix des vivants…
Et parce qu’il nous serait sacrilège d’admettre désormais ce que les morts ont détesté…
La paix, que nous devons à leur sacrifice, nous jurons de la sauvegarder et de la vouloir.
« Serment de Douaumont »

 

Jean Suberville écrivit un magnifique poème où il exaltait cette idée généreuse. Voici quelques extraits du manuscrit de Jean Suberville publiés dans l’almanach du combattant pour l’année 197, 40 ans après.

Nous irons à Verdun en colonne profonde,
Peuple immense poussé par le souffle d’un Dieu ;
Trois générations des quatre coins du monde
Se lèveront ainsi pour gravir le haut-lieu.


Ceux qui ne viendront point délègueront leurs âmes,
Pour que nous soyons là tous ensemble à la fois ;
Et les morts à leur tour, veillant comme des flammes,
Nous attendront là-haut dans la forêt des croix.
 
Nous partirons, vieillis, mais forts et fiers encore,
Chacun, de son pays, du seuil de sa maison,
A l’appel de son coq, au feu de son aurore,
Les yeux pleins de son rêve et de son horizon. 

Les longs trains en sifflant à travers les nuits fraîches,
De Bayonne et de Metz, de Calais et d’Embrun,
Seront en même temps lancés comme des flèches
Qui toutes viseront le grand cœur de Verdun ! 

Mais au lieu d’un bûcher où s’immole la France,
Verdun ne dresse plus que son phare éternel ;
Et nous irons vers lui conduits par l’espérance,
Tels les mages suivant l’étoile de Noël ! 

Nous serons tous là, devant l’Ossuaire,
Survivants et morts, croyant au cœur pur,
Emplissant la nef de ce sanctuaire
Fait de terre sombre et de ciel obscur. 

Ces graves plateaux couverts de ténèbres,
Où l’orgue des vents chante un air mortel,
Etendront sans fin leurs tertres funèbres
Et nous serviront de table d’autel. 

Et sur cet autel nous mettrons nos haines,
Nos coups de cafard, nos amours aussi,
Nos nuits sans sommeil, nos sueurs, nos peines,
Toute notre angoisse en tenant ici. 

La montée au Front dans la boue épaisse,
Ce dur va-et-vient sans plus s’arrêter,
Double noria qui tournait sans cesse
Et versait le sang de chaque côté! 

Nous mettrons le poids des morts misérables,
Plus d’un million de crânes séchés ;
L’espoir de leurs fils, ces fleurs innombrables
Qui devaient sortir des printemps fauchés !

Nous mettrons enfin les larmes des mères,
Des veuves ainsi que des orphelins,
Immense marée aux vagues amères
Dont tous les pays sont encore pleins ! 

Nous ajouterons les exploits sublimes,
Les drapeaux hachés et les croix d’honneur,
Toute l’épopée atteignant les cimes
Du renoncement et de la grandeur ! 

… Devant le Ciel qui nous entend, devant les hommes
Qui devront nous entendre aussi,
Nous qui venons de tous les pays et qui sommes
Ceux qui se battirent ici. 

Au nom de ceux qui ne sont plus, de ceux qui vivent,
Et de ceux qui naîtront demain,
Contre et malgré les destins noirs qui nous poursuivent,
Pour prix de tout ce sang humain : 

Nous voulons qu’à jamais soit maudite la guerre
Et que, rois, soldats ou tribuns,
Pour régler nos conflits les maîtres de la terre
Ne fassent plus d’autres Verduns ! 

Nous voulons une paix qui, sans être éternelle,
Ne soit pas une illusion ;
Que le vol des corbeaux n’étende point son aile
Sur chaque génération !

Nous voulons que Verdun serve et que soit féconde
La souffrance des purs, des forts,
Car la grande victoire est dans la paix du monde,
Payée au poids de tant de morts !

Et nous, les combattants de la dernière guerre,
Comme autrefois sur tous les fronts,
Nous jurons de veiller sur cette paix si chère :
Devant ces morts nous le jurons ! »
 

Jean Suberville.

 

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